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Azulejo
C’est l’un des joyaux du Portugal : l’art des azulejos. Lisbonne, dont plusieurs stations de métro sont magnifiquement décorées de ces somptueux carreaux de faïence, a même ouvert un musée dédié. Les voisins ibères ne sont pas en reste, puisque c’est en Espagne que ce type d’ornementation s’est développé, plus précisément en Andalousie, à partir du XVe siècle.
Quelle est l’origine de cette appellation ? À première vue, « azulejo » proviendrait du mot « azul », qui, en portugais comme en espagnol, signifie « bleu ». Et comme les azulejos sont dans leur écrasante majorité de cette couleur, la boucle semble bouclée… Que nenni ! En réalité, ce terme a une étymologie arabe. Il s’agit en effet d’un dérivé du mot « al zulaydj », qui signifie « petite pierre polie » (d’ailleurs, en Afrique du Nord, on parle pour désigner la céramique émaillée — une cousine germaine de l’azulejo — de « zellige », qui a donc la même étymologie).
Dégradés et clair-obscur
Pourquoi des pierres polies ? Car au commencement, la technique des azulejos consistait à imiter les fameuses mosaïques romaines en assemblant des bouts de carreaux de faïence colorée. Ce furent les Maures qui apportèrent en Andalousie, qu’ils occupaient alors, la technique de fabrication de ces carreaux de terre cuite recouverts d’un émail opaque. Dès le XIIIe siècle, les azulejos commencèrent à être apposés un peu partout, en guise de décoration : sols, plafonds, fontaines, cheminées, murs, etc., en Espagne comme au Portugal. La place de l’Alhambra, à Grenade, en comporte de magnifiques exemples.
Et preuve que ce n’est pas leur teinte azur qui leur a donné leur nom, ces carreaux étaient originellement souvent jaunes, verts ou bruns. D’abord non figuratif (en respect des principes de l’islam sunnite), l’art de l’azulejo prit un tout nouveau tournant à la Renaissance, une fois les Maures chassés d’Espagne, en 1492. À la toute fin du XVe siècle, Francesco Niculoso, un peintre italien spécialiste de la majolique, s’installa à Séville, où il appliqua aux azulejos cette technique de fabrication d’objets en terre cuite ornés de décorations bariolées, essayant même de créer des dégradés et du clair-obscur.
Le bleu et le blanc, marques de fabrique de l’azulejo
C’est ainsi que furent créées de grandes scènes figuratives, voire narratives, non seulement à Séville, mais aussi dans d’autres villes espagnoles, et surtout au Portugal. Le royaume développa un goût immodéré pour les azulejos, qu’il introduisit aussi dans ses colonies, comme le Brésil et ses comptoirs asiatiques. Puis au XVIIe siècle, sous l’influence hollandaise et ses panneaux bleus et blancs que le Portugal commanda en masse afin d’orner ses palais et ses églises, le pays opta pour ces couleurs, devenues la marque de fabrique des azulejos. Et c’est peut-être ainsi que naquit la légende de l’étymologie de ce mot…