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Cravate
« La cravate, c’est l’homme », écrivit un jour Honoré de Balzac. Cet accessoire traditionnellement masculin, vécu comme une entrave par certains, une manifestation de mode par d’autres, voire l’expression d’un féminisme très « marlénien », a des origines étymologiques slaves, liées à l’histoire de France.
La cravate, successeur du jabot
En 1635, sous le règne de Louis XIII, un régiment de hussards croates vint renforcer le contingent des cavaliers français, à la faveur de leurs exploits à la Guerre de Trente ans (1618-1648). À leur cou était nouée une sorte de foulard blanc, élément incontournable de leur uniforme. Bientôt, ce morceau de tissu fut surnommé « cravate », une déformation francophone du mot qui signifie « croate » dans la langue de ces hussards : « hrvat ». Le Roi Soleil, fils et successeur du monarque qui les avait accueillis, grand amateur et surtout lanceur de modes, commença à porter la cravate, agrémentée de rubans de soie de couleur. Elle remplaça ainsi petit à petit à la cour le jabot de dentelle, lui-même successeur de la très peu confortable fraise.
De cravate en régate
À l’époque, la cravate était composée d’une large bande de coton ou de lin ornée de dentelle et simplement nouée autour du coup, ses deux extrémités pendant sur les côtés. N’écoutant que ses envies, le roi créa une fonction nouvelle à la cour : celle de cravatier.
Ce dernier avait la lourde tâche de choisir non seulement la cravate, mais aussi les boutons de manchette et les diamants qu’allait arborer Louis XIV ! Très controversée pendant la Révolution française, la cravate sauva cependant sa tête et se transforma au XIXe siècle en « régate », dont la forme rappelle davantage les cravates modernes.
Naissance de la cravate moderne
Mais pour voir arriver le modèle porté aujourd’hui, il fallut attendre les années 1920 et le New-Yorkais Jesse Langsdorf, qui tailla la cravate en diagonale, à un angle de quarante-cinq degrés, et la confectionna en trois parties. Pour terminer, rendons à César ce qui appartient à César. Très fiers de leur héritage, les Croates créèrent la plus grande cravate du monde en 2003 : longue de 808 mètres sur 25 mètres de large, elle fut nouée en près de onze heures autour des arènes de Pula. Pour confectionner cet accessoire de 450 kg qui n’aurait sans doute pu être porté que par Gulliver, il fallut 8 250 m2 de tissus, 120 km de fil et 300 heures de travail. Puis en 2006, une autre cravate fut étendue le long des 4 000 km de frontière croate, avant d’être nouée par quatre alpinistes et trois journalistes à Dubrovnik. La cravate, c’est donc aussi la vanité…